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Le singularitarisme

En 1965, l’ingénieur Gordon Moore, futur cofondateur d’Intel, formule une loi empirique fondée sur le constat du doublement pour un même coût de la puissance des puces électroniques tous les deux ans. A partir de cette observation, il conclut que la puissance des ordinateurs doublera au même rythme.

Cette loi de Moore s’est par la suite vérifiée, notamment parce que l’industrie s’est organisée en ce sens. Bien que désormais obsolète en raison d’une hausse des coûts de production et d’une dégradation des performances passé un certain stade de miniaturisation des composants, elle continue de fonder l’idée d’un avènement de la singularité. Pour les singularitariens, à commencer par Ray Kurzweil et sa Singularity University (dont une antenne s’implantera prochainement à Bordeaux), l’augmentation exponentielle de la puissance des ordinateurs alliée à la convergence des NBIC conduira inévitablement au dépassement de l’intelligence humaine par l’intelligence artificielle. Cet évènement, qui devrait se produire aux environs de 2040, marquera l’entrée dans une nouvelle ère : celle d’une explosion des capacités des IA entraînant des évolutions sociales majeures voire une redéfinition de la notion même d’humanité.

 

 

 

 

Un tel développement des sciences et technologies tendrait ultimement vers un « point Omega [1]» : le moment où l’humanité, capable de télécharger son esprit dans des substrats non biologiques et d’accéder à des connaissances potentiellement infinies, accéderait à un état de quasi divinité. Pour le mathématicien Frank Tipler[2], l’effondrement progressif de l’univers entraînera une concentration de l’énergie et une capacité de calcul illimitée, permettant ainsi à ces êtres transcendés d’atteindre l’immortalité en recréant artificiellement dans des simulations tous les êtres ayant jamais existé dans l’univers.

 

[1] La paternité de l’expression est attribuée à Teilhard de Chardin, qui a considérablement influencé Tipler. Elle possède chez le paléontologue jésuite une dimension aussi religieuse que scientifique : le point Oméga désigne pour lui le point final de convergence de l’évolution d’espèces de plus en plus complexes – la complexité s’accompagnant selon lui de niveaux de conscience croissants.

[2] Frank Tipler, The Physics of Immortality : Modern Cosmology, God and the Resurrection of the Dead. New-York, Doubleday, 1994, 527 p.

 

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